Comment McDonald’s est devenu une marque française 

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Face au boycott de leurs produits et dans une dynamique de développement dans les territoires ruraux, McDonald’s incarne l’ambiguïté d’une marque américaine exerçant une influence considérable sur la société française — et inversement, une marque qui s’est profondément adaptée à la culture française au point de devenir un incontournable des habitudes des Français. L’observatoire Hexagone revient sur le rapport des Français à McDonald’s ainsi que sur son implantation, en particulier dans les territoires ruraux. 

L’analyse 

Alors que la concurrence entre fast-foods s’intensifie, les restaurants McDonald’s continuent de dominer le paysage en France 

L’un des phénomènes sociétaux marquants de ces trente dernières années est la croissance continue du nombre de restaurants de burgers en France entre 1995 et 2025. Leur nombre est passé d’environ 562 en 1995 à près de 2 707 en 2025, soit une multiplication par presque cinq en trente ans — et ce, uniquement en prenant en compte les grandes chaînes. 

Malgré la diversification de l’offre des chaînes de burgers, McDonald’s se distingue en dominant largement le secteur tout au long de la période. Le nombre de ses restaurants passe de 306 en 1995 à 1 598 en 2025, représentant à lui seul près de 60 % des points de vente. Sa croissance est régulière, sans phase de stagnation, à la différence de chaînes françaises comme Quick, illustrant ainsi une stabilité dans le paysage social des pratiques alimentaires des Français.  

Symbole de la pression concurrentielle dans le secteur, certaines chaînes de restauration rapide comme KFC ont augmenté le nombre de leurs restaurants de 122 % en seulement dix ans, contre 22 % pour McDonald’s sur la même période. 

Fort d’un nombre de restaurants nettement supérieur à celui de ses concurrents, McDonald’s se distingue également par une répartition géographique plus équilibrée. Il est le seul à être présent dans toutes les catégories de territoires, y compris les zones rurales — où 16 % de ses restaurants sont implantés —, contrairement à Burger King ou KFC, majoritairement concentrés dans les grandes villes et leurs périphéries (jusqu’à 55 % des restaurants pour KFC). Et ce, malgré une stratégie récente de Burger King visant à investir également les villes moyennes. 

Installé dans la durée, McDonald’s est devenu une marque fondamentale dans la vie des Français. 

Dans une analyse publiée en 2022 et intitulée Génération McDo, Jérôme Fourquet explore en profondeur la relation des 18-35 ans avec McDonald’s, mettant en lumière le rôle central que joue l’enseigne dans divers aspects de leur vie quotidienne et sociale. C’est d’abord la familiarité avec la marque et ses modes de consommation qui interpelle : 51 % des 18-35 ans fréquentent McDonald’s au moins une fois par mois, dont 22 % plusieurs fois par mois. Seule une minorité (14 %) déclare ne jamais ou presque jamais s’y rendre. 

Cela s’explique par une socialisation précoce, qui ancre très tôt le rapport à l’enseigne dans un processus de transmission familiale : 56 % des jeunes ont découvert McDonald’s à l’âge de 8 ans ou moins, souvent en compagnie de leurs parents (51 %). 

Surtout, McDonald’s accompagne les grandes occasions et les principaux rites de passage des jeunes Français : 40 % y ont déjà célébré un anniversaire, 46 % y ont fêté l’obtention du permis de conduire, et 22 % ont même choisi McDonald’s pour une première sortie en amoureux. 

McDonald’s, le nouveau café-restaurant du coin 

Au-delà des grandes étapes de la vie, la manière dont les jeunes fréquentent McDonald’s inscrit l’enseigne dans un univers familier, voire routinier. Elle joue un rôle important, notamment dans les zones peu pourvues en lieux de rencontre, comme les banlieues résidentielles ou les territoires ruraux. 

En effet, 49 % des 18-35 ans se rendent chez McDonald’s uniquement pour consommer une glace, une boisson ou un café, et 39 % s’y rendent pour retrouver leurs amis — signe que l’enseigne joue aussi un rôle de lieu de détente et de socialisation. Dans cette logique, McDonald’s vise l’objectif d’un restaurant « à moins de 20 minutes » de chaque Français, en particulier dans les petites communes, avec des établissements ouverts tous les jours et sur de larges plages horaires. 

Si aujourd’hui 45 % de la population française vit dans une commune où un restaurant McDonald’s est implanté, l’enseigne vise désormais l’ouverture de nouveaux établissements dans les zones rurales. En 1999, José Bové et des militants démontaient un McDonald’s en construction à Millau — ville de 21 000 habitants à l’époque — pour protester contre la mondialisation et les sanctions américaines. Aujourd’hui, 71 % des communes accueillant un McDonald’s sont des villes plus petites que Millau. 

Une stratégie de déploiement de McDonald’s ciblant particulièrement les zones rurales : ce que révèlent les ouvertures de restaurants depuis 2021 

Avec pour objectif à terme de proposer un restaurant à moins de 20 minutes de route pour chaque Français, McDonald’s France a annoncé l’ouverture de 50 nouveaux établissements en 2025. Hexagone a analysé en détail les plus de 60 ouvertures réalisées depuis 2021 : dans deux tiers des cas, l’implantation concernait une petite ville ou une commune rurale. 

Toutefois, il est important de noter que ces ouvertures se font exclusivement en périphérie des centres de ces communes, notamment dans des zones commerciales situées à proximité des axes de communication, afin d’en faciliter l’accès. Ce choix d’implantation vient parfois confirmer les inquiétudes liées à la désertification des centres urbains. 

Une chance pour l’emploi, notamment des plus jeunes 

L’influence de McDonald’s n’est donc pas seulement géographique ou sociale : elle est aussi professionnelle et économique. Un restaurant génère chaque année entre 50 et 100 contrats de travail, quelle que soit leur durée. L’implantation d’un établissement peut ainsi avoir un impact considérable sur un territoire. Dans son étude de 2022 l’Ifop révélait que 11 % des 18-35 ans déclaraient avoir déjà travaillé chez McDonald’s, et que 59 % connaissaient quelqu’un qui y avait été employé. L’enseigne s’impose alors comme une première porte d’entrée dans le monde du travail — une étape fondamentale pour de nombreux jeunes. 

Si l’on considère uniquement les communes et bourgs ruraux, une comparaison entre ceux qui disposent d’un restaurant McDonald’s et ceux qui n’en ont pas révèle que les premiers présentent généralement des indicateurs sociaux moins favorables : le taux d’allocataires du RSA parmi les 20-64 ans y est plus élevé (8 % contre 4 %), tout comme le taux de chômage (11 % contre 9 %). Les restaurants McDonald’s s’implantent ainsi souvent dans des territoires en perte de vitesse ou en difficulté sociale, apportant un certain soutien économique local. 

La France a elle-même exercé une influence considérable sur l’évolution de la marque McDonald’s. 

Pour illustrer cette influence, on peut citer le parcours de Denis Hennequin, nommé PDG de McDonald’s France en 1999, puis président de McDonald’s Europe à partir de 2005. Sous son impulsion, McDonald’s France, puis McDonald’s Europe, ont adopté une stratégie plus étroitement ancrée dans les réalités nationales, culturellement adaptée aux spécificités françaises et européennes. 

Parmi les changements notables, McDonald’s en Europe adopte progressivement, à partir de 2009, un logo sur fond vert. Cette initiative vise à refléter l’engagement de l’entreprise en faveur du développement durable et à favoriser une meilleure intégration dans le paysage urbain. Ce choix s’inscrit dans une stratégie plus large de modernisation de l’image de la marque, en réponse aux attentes croissantes des consommateurs en matière de responsabilité environnementale — une tendance particulièrement marquée en Europe. 

Deuxième marché de l’entreprise en chiffre d’affaires, juste derrière les États-Unis, la France fait figure de terrain d’expérimentation pour de nombreuses innovations de la marque : bornes de commande automatiques, menus spéciaux nationaux ou encore politiques de développement durable, testés dans l’Hexagone avant d’être déployés ailleurs, notamment en Europe. 

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